Si l’un de nos étudiants en droit confondait droit et morale, il serait immédiatement corrigé. C’est pourtant ce que fait le Gouvernement, en proposant un « projet de loi sur la moralisation de la vie publique ».
Si quiconque se posait en donneur de leçons, se présentant comme celui qui sait distinguer le bien du mal, il serait immédiatement vilipendé. C’est pourtant ce que fait le Gouvernement, en nous parlant de « moralisation de la vie publique ».
Heureusement, à ce stade, nous avons une explication : il s’agit de « redonner la confiance dans la vie démocratique ». Nul ne pourrait y être opposé, mais encore faut-il en connaître les exactes modalités.
Leurs grandes lignes ont été présentées au cours d’une conférence de presse du Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, jeudi 1er juin. Il est toujours risqué de commenter une réforme au stade de projet, a fortiori lorsque son contenu n’est pas connu dans ses détails. Néanmoins, on peut percevoir cette stratégie de communication comme de la saine pédagogie, nous permettant de contribuer à la réflexion en amont, afin de nourrir la réforme en aval.
Celle-ci se divise en trois chapitres, relevant de lois constitutionnelle, organique et ordinaire. Décodage.
Une nouvelle fois, un responsable politique a été « épinglé » par la presse pour ce qui pourrait constituer, à première vue, un conflit d’intérêts.
Ni juge ni avocat ni procureur ni enquêteur ni journaliste ni quoi que ce soit qui conduirait à fouiller n’importe quoi dans les affaires de n’importe qui, La Constitution décodée n’entend nullement s’aventurer sur le terrain de la véracité, l’opacité ou encore la fausseté des faits.
On sait que Le Canard enchaîné est un excellent journal, comme il en existe d’autres et qu’il fait un formidable travail d’investigation. Il ne contrôle cependant pas ou peu les réactions de l’opinion publique et des autres responsables politiques, d’abord quant à « l’affaire » proprement dite, ensuite quant aux suites juridiques et politiques qu’il convient de lui donner.
Là encore, ici n’est pas le lieu, du moins à ce stade, de tergiverser sur le premier aspect. On soulignera simplement qu’il y a toujours plusieurs façons de présenter une information, que les journalistes le savent et que cette présentation influe naturellement sur la perception du lecteur.
Les ordonnances ne sont pas une arme de contournement du Parlement, mais un mécanisme de son soulagement.
Par conséquent, en elles-mêmes, elles ne sont pas antidémocratiques, pour au moins trois raisons cumulant bon sens politique et justification constitutionnelle. À condition que le Gouvernement sache en user sans en abuser.
En premier lieu, il n’est pas inutile de rappeler qu’elles sont autorisées par la Constitution, laquelle en fixe ainsi le régime général.
Elle consiste en une extension temporaire et limitée du pouvoir réglementaire, lequel est habilité à intervenir dans certains domaines législatifs spécifiquement identifiés. L’habilitation ne peut être donnée que par une loi, votée selon la procédure législative ordinaire et à la seule demande du Gouvernement, le Parlement ne pouvant pas, ainsi, proposer de se dessaisir.
La formule n’est pas qu’oratoire : élu, investi, entouré, « au travail », tout reste encore à faire pour le Président de la République. Car il lui est désormais indispensable d’obtenir une majorité présidentielle. Elle sera peut-être composite, plurielle ou à géométrie variable mais elle est incontournable : sans elle, point de stabilité gouvernementale, point de réformes possibles, point de projet de Gouvernement.
Et la tâche est immense. Tout se décidera les 11 et 18 juin et étant donné les circonstances, il est possible, mais nullement certain que La République en marche obtienne une majorité, même relative.