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Passe sanitaire et réunions politiques
Peut-on imposer le passe sanitaire lors de meetings politiques ?
La première et grande rencontre, hier à Paris, en plein rebond de l’épidémie, de « Ensemble citoyens ! », le mouvement supposé accueillir les partis politiques qui soutiendront la candidature d’Emmanuel Macron, a mis le sujet sur la table.
A ce jour, la situation juridique est limpide, grâce au Conseil constitutionnel qui l’a clairement exprimée. Dans sa dernière décision du 9 novembre sur la loi de vigilance sanitaire, il a confirmé que « si ces mesures peuvent intervenir en période électorale, la présentation du « passe sanitaire » ne peut être exigée pour l'accès aux bureaux de vote ou à des réunions et activités politiques ».
Faute de rendre la vaccination obligatoire, la loi pourrait imposer le passe sanitaire pour les réunions politiques, mais pas n’importe comment
Cette analyse est justifiée par le nécessaire respect des exigences démocratiques et du principe constitutionnel de liberté de réunion, en particulier en période électorale. En effet, pour que les scrutins puissent se dérouler de façon libre et non faussée, il faut que les différents candidats et partis qui y interviennent puissent exposer de façon égalitaire et sans contrainte excessive leurs positions, programmes et arguments.
Mais alors comment conjuguer ces nécessités démocratiques avec la garantie, tout aussi nécessaire, de la santé publique, tout en assurant à l’ensemble des citoyens qu’en se rendant à une réunion politique, ils ne s’exposent pas à un danger sanitaire ? En effet, on comprend aisément l’impossibilité démocratique d’exiger le passe sanitaire pour permettre que les opinions politiques puissent s’exprimer et se diffuser librement. Mais pour qu’il en soit effectivement ainsi, il faut que les citoyens ne se sentent pas mis en danger lorsqu’ils se rendent à une telle rencontre.
Une solution serait de rendre la vaccination obligatoire. Elle parait constitutionnellement possible, car les conditions posées par le Conseil constitutionnel pour qu’un vaccin puisse être rendu obligatoire semblent remplies : dans une décision de 2015, il a retenu qu’une politique de vaccination obligatoire était possible afin de protéger la santé individuelle et collective, afin de lutter contre des maladies très graves et contagieuses ou insusceptibles d'être éradiquées. Évoquée comme solution alternative lors de la mise en place du passe sanitaire au début de l’été, elle paraissait alors difficile à mettre en œuvre, alors qu’une partie encore importante de la population n’était pas vaccinée. Mais ce qui était difficile avec un faible taux de vaccination, l’est beaucoup moins lorsque ce dernier atteint les 90% de la population éligible.
Cependant, le Gouvernement ne semble pas prêt à s’orienter vers cette solution, qui serait pourtant la plus égalitaire.
Une autre solution consisterait à faire évoluer la législation sur le passe sanitaire, mais pas n’importe comment. En effet, le Conseil constitutionnel, dans ces décisions en interdisant l’application aux réunions politiques, a émis une réserve d’interprétation, indiquant que la notion « d’activités de loisir » mentionnées par la loi ne recouvrait pas ce type de réunion. Il n’a pas, ce faisant, censuré une disposition de la loi qui aurait visé expressément les activités politiques.
Il serait alors possible d’inscrire dans la loi que l’accès aux réunions politiques peuvent être soumises à l’exigence du passe sanitaire, à la condition toutefois d’entourer cette exigence de garanties. Il est alors nécessaire d’en restreindre l’application aux seules circonstances où sa présentation est absolument indispensable pour assurer la sécurité et la santé des personnes présentes. On peut ainsi imaginer qu’une telle exigence soit restreinte aux réunions dans des lieux fermés, destinées à accueillir un nombre important de personnes et dans des zones marquées par une circulation très active du virus.
Dans un cas comme dans l’autre, pour imposer la vaccination obligatoire ou pour étendre l’application du passe sanitaire, une nouvelle loi est nécessaire. L’épidémie et ses rebonds n’a sans doute pas fini de mobiliser le législateur !