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Une primaire, mais pas n’importe laquelle

On croyait le processus définitivement enterré, après que, en 2017, aucun candidat qui en était issu n’était parvenu à accéder au second tour de l’élection présidentielle. Voici qu’il renaît de ses cendres… ou presque. La droite a organisé une primaire semi-fermée, en engrangeant une vaste campagne d’adhésion au parti des Républicains et débouchant sur la désignation d’une candidate propulsée dans les sondages, dès le lendemain. Auparavant, les Verts avaient également organisé une primaire, selon un processus similaire, consistant non à adhérer au parti, mais au processus lui-même, en s’acquittant d’une cotisation symbolique. Le Parti socialiste, quant à lui, a organisé une primaire purement interne.

Toutefois, ces processus sont différents des primaires « ouvertes » qui ont été organisées en vue de l’élection présidentielle de 2017 ou par le Parti socialiste, en 2011. Ils se limitent, en effet, aux adhérents d’un parti, nonobstant l’ouverture qui les précèdent. Ainsi restreintes, elles ne prétendent pas être un tour préalable de l’élection présidentielle, ni ne permettent véritablement à des électeurs qui n’adhèrent pas à l’idéologie du parti concerné de participer au scrutin : la barrière de l’adhésion au parti est psychologiquement plus difficile à franchir que simplement se déplacer à un scrutin et de s’acquitter d’une somme particulièrement modique (un ou deux euros).

Aucun candidats de gauche n’est en mesure d’affirmer une volonté politique, susceptible de créer une dynamique : si tel était le cas, ce serait déjà fait


Anne Hidalgo propose désormais qu’une primaire de toute la gauche soit organisée, ouverte aux candidats qui sont prêts « à gouverner ensemble ». La proposition est sage, car le rassemblement est nécessaire et l’instant de la primaire créera une dynamique politique et démocratique. Mais les réponses n’ont pas tardé, en étant prévisibles : « circulez, ce sera sans nous » disent, en chœur, les Verts, les Communistes et les Insoumis. C’est une évidence puisque les premiers ont fait « leurs » primaires, les deuxièmes n’ont rien à perdre et les troisièmes sont obstinés.

Cependant, aucun d’entre eux n’est en mesure d’affirmer une volonté politique, susceptible de créer une dynamique : si tel était le cas, ce serait déjà fait. C’est pourquoi une telle initiative est nécessaire et traduit cette volonté politique de créer une convergence sur un accord de gouvernement commun. Ceux qui, désormais, la refusent, rejettent par là même tout accord, toute volonté de converger. À l’inverse, une telle initiative peut encore prospérer, à la condition de s’appuyer sur une organisation solide, qui permette à la fois de propulser le candidat qui en sera issu, sans anéantir les forces politiques qui y ont participé.

Pour cela, plusieurs conditions doivent être remplies, concernant l’organisation, les candidatures et les électeurs.

D’abord, une autorité indépendante de chacun des partis politiques impliqués, mais en qui chacun d’entre eux a confiance, doit être en charge de l’organisation. Elle devra notamment veiller au respect de l’égalité entre chaque candidat, sans qu’aucun d’entre eux ne puisse s’approprier ou, pire, contrôler le processus de désignation.

Ensuite, les candidats et, derrière eux, les forces politiques qui les soutiennent, doivent s’accorder communément sur une charte de Gouvernement, fixant la ligne idéologique fondamentale et le point de convergence politique de ceux qui décideront de participer à cette primaire. Elle permettra également de déterminer qui et quelles forces politiques souscrivent à ce processus de désignation et quelles sont les conditions pour y être candidat, chaque parti signant la charte devant, sur ce point, demeurer libre des modalités qu’il entend retenir pour présenter une, mais qu’une seule candidature. Surtout, une union n’est possible que sur un projet de gouvernement : cette charte doit en fixer les axes principaux.

Enfin, afin de créer une dynamique nécessaire à la campagne électorale, tout en garantissant que le processus de désignation n’est pas faussé, ce dernier doit être restreint aux adhérents des différentes forces politiques qui s’y inscrivent, tout en permettant à ceux qui ne les ont pas encore rejointes, de le faire directement auprès de l’autorité organisatrice, avant une certaine date et en s’acquittant d’un montant minimal mais qui ne soit pas purement symbolique.

C’est une garantie, d’une part, que seules participeront à un tel processus les personnes qui y croient réellement et qui adhèrent au positionnement politique qui y est défendu. D’autre part, c’est un moyen réel de créer un rassemblement démocratique derrière une candidature transpartisane – car tel est l’objectif – sur lequel le candidat ainsi désigné pourra s’appuyer, ensuite, pour mener sa campagne. Enfin, c’est engendrer une dynamique politique dont toute candidature à l’élection présidentielle a besoin, car le rassemblement derrière un processus de désignation, à condition qu’il s’appuie sur un projet commun, permettra, ensuite, le rassemblement derrière un candidat désigné.

Les partis politiques qui y auront participé et leurs candidats, le candidat lui-même et les adhérents ont tous à y gagner et, avec eux, notre propre démocratie.

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