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Le prix à payer

Le coût est un enjeu fondamental en politique.

Chaque décision connaît un prix à payer, si bien que chaque décision se justifie et s’explique par le coût qu’elle engendre. Cela vaut au propre comme au figuré : ce coût est financier et politique.

Avant d’examiner le présent, jetons un regard vers le passé, certes récent.

Pourquoi Emmanuel Macron s’est-il lancé seul dans la campagne présidentielle ? Parce que politiquement, il avait beaucoup à gagner, même si le pari fut osé. Parce que financièrement, il savait pouvoir compter sur de multiples soutiens, lui assurant de pouvoir financer une bonne partie de sa campagne. Sa percée sondagière a fait le reste : rassuré par les intentions de vote, crédibilisé par des alliés importants, il est désormais certain de dépasser la barre des 5% des suffrages exprimés, lui garantissant le remboursement de 47,5% du plafond des dépenses (soit plus de 8 millions d’euros pour le premier tour, soit le montant qu’il a emprunté).


Pourquoi Arnaud Montebourg n’a-t-il pas fait cavalier seul et s’est-il inscrit dans la primaire de La belle alliance populaire ? Parce que politiquement, il aurait pu le payer très cher en étant définitivement exclu d’un parti dont il a besoin pour exercer le pouvoir et, surtout, financièrement, sans l’appui d’un parti politique, il n’avait pas suffisamment d’argent pour financer une campagne présidentielle.

Pourquoi Alain Juppé s’est-il finalement et définitivement rallié à François Fillon ? Parce que, si, politiquement, sa démarche aurait pu être couronnée de succès, le risque restait élevé. Parce que, financièrement, pour minimiser ce risque, il aurait fallu faire une campagne coûteuse, grâce à des fonds dont il ne disposait pas sans le soutien d’un appareil partisan.

Pourquoi François Fillon s’est-il maintenu ? Parce que, politiquement, il n’avait rien à perdre et que, financièrement, il avait l’appui de son parti.

Autant de décisions qui sont davantage dictées par un enjeu financier et politique que par l’intérêt général. C’est malheureux mais c’est ainsi.

Aujourd’hui, plusieurs responsables politiques prennent, sont tentés ou ont été tentés de prendre des décisions s’écartant de la ligne générale de la famille politique à laquelle ils appartiennent. Cela vaut à Droite comme à Gauche.

Force est néanmoins de constater que les dissidences sont moins nombreuses au sein de l’opposition que de la majorité actuelles. Cela s’explique, à nouveau, par une raison simple : le prix à payer.

Là où l’opposition n’a pas beaucoup à perdre d’une nouvelle défaite, étant déjà privée du pouvoir, mais tout à gagner d’une victoire, une défaite coûte cher à la majorité. Dissidences et divisions se multiplient, toutes destinées à sauver les meubles, autant que faire se peut. Les individualités (re)surgissent, pour tenter de conserver leur place, au détriment de la force du groupe, promis à une déroute.

Les sanctions se font alors menaçantes. La direction du Parti socialiste a décidé de saisir la commission nationale des conflits (organe interne du parti) des cas de ceux qui déclarent soutenir ou voter pour un autre candidat que Benoît Hamon. La Haute autorité éthique, quant à elle, s’est autosaisie pour rappeler le principe de loyauté et le devoir de soutien aux candidats investis par le parti.

Mais elle a également rappelé « que ces principes n’ont pas toujours été respectés dans le passé »… Tandis que les frondeurs restent sagement assis et ne craignent rien, les marcheurs se lèvent et marchent vers des sanctions. Certains s’en émeuvent. À juste titre.

Ces sanctions seront-elles effectivement prises ? C’est possible, mais tout est dans la nuance des termes employés et, encore et toujours, dans le prix à payer.

Jean-Christophe Cambadélis menace d’exclusion ceux qui « adhèreraient » à En Marche ! Sauf que annoncer que l’on votera Emmanuel Macron ne constitue pas une adhésion formelle.

Surtout, si le Parti socialiste ne veut pas être définitivement enterré, il aura besoin de fonds publics, au lendemain des échéances électorales et pour les cinq prochaines années. Or ces derniers sont attribués en fonction de deux éléments : le résultat aux élections législatives et le nombre de parlementaires. Pour simplifier, un député élu rapporte au parti auquel il déclare appartenir plus de 35 000 € par an. À cela s’ajoute la somme récoltée grâce au nombre de voix obtenues au premier tour des élections législatives, par les candidats investis par le parti concerné.

C’est dire si les partis politiques ont besoin, politiquement et financièrement, de présenter des candidats capables de récolter des voix et d’être élus. Or, à exclure le moindre dissident, les chances baissent et les finances aussi : c’est le prix à payer.

Et la note peut être salée.

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