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L'automne sera chaud

L’automne sera chaud. Ce n’est pas un effet – direct – du dérèglement climatique, qui emporte des conséquences dramatiques sur l’environnement et les espaces naturels, comme les incendies qui ont ravagé l’Europe et la France cet été. Il est toujours plus urgent, cependant, de prendre conscience de la nécessité impérative de changer nos comportements, non seulement individuels mais surtout collectifs, à l’échelle de la planète. Le sujet s’invitera au Parlement, tant lors des débats budgétaires, puisque la loi de finances devrait traduire en chiffres la politique environnementale du Gouvernement, que lors de l’examen d’un projet de loi d’accélération des énergies renouvelables, présenté ce matin en Conseil des ministres.

L’automne sera chaud. Ce n’est pas dû à la vague brune qui commence à envahir l’Europe, avec la victoire de l’extrême droite en Suède et en Italie. Ces victoires sont toutefois inquiétantes, même si elles sont parfaitement démocratiques. L’idéologie politique de ces partis, en dépit de leurs tentatives de « dédiabolisation », s’inscrit dans l’héritage des Gouvernements européens qui ont prôné la discrimination, la xénophobie, le nationalisme et qui, comme le rappelle le Préambule de notre Constitution, « ont tenté d’asservir et de dégrader la personne humaine ». Leurs responsables d’aujourd’hui le confirment : leur ligne principale demeure la lutte contre l’immigration et la préférence nationale ; Giorgia Meloni considère que Mussolini, père d’un système d’oppression et allié de l’Allemagne nazie, a été « un bon politicien » ; Marine Le Pen appelle ouvertement à la violation de la Constitution.

L’automne sera chaud, en France, en raison des tensions politiques et sociales qui s’annoncent.

Cette façon de procéder éclaire sur la méthode de gouvernance : une verticalité dont le Président de la République peine à se défaire

Les débats législatifs seront denses, entre les questions budgétaires (loi de finances et de financement de la sécurité sociale) et d’autres projets de loi d’importance, tel celui sur les énergies renouvelables ou celui sur l’orientation et la programmation du Ministère de l’Intérieur, sans oublier celui sur les mesures d’urgences relatives au marché du travail.

Des sujets clivants s’inviteront dans les débats : la sobriété énergétique, l’inflation, la dette et la maîtrise des dépenses publiques, la réforme de la police judiciaire et, bien sûr, la réforme des retraites.

Cette dernière est le véritable serpent de mer d’Emmanuel Macron, alors qu’elle avait dû être abandonnée au début de la crise sanitaire (mars 2020) après avoir été adoptée, en première lecture à l’Assemblée nationale, en ayant recours à l’article 49, al. 3. Elle interpelle aujourd’hui quant à la stratégie politique et à la procédure constitutionnelle mobilisée.

Hypothèse a été émise qu’une partie de cette réforme – celle concernant le recul de l’âge légal de départ à la retraite – pourrait être insérée dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 afin, soutient-on officiellement, de lancer cette réforme prioritaire au plus vite.

Un autre argument, qui n’est admis qu’à demi-mot, est la possibilité alors de recourir à ce fameux « 49.3 » pour l’adopter, sans utiliser la « cartouche » réservée à un texte par session, puisque cet article peut être mobilisé sur les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale autant que le Premier ministre le souhaite.

Il fait peu de doutes, d’une part, qu’un tel amendement serait recevable, le sujet paraissant effectivement pouvoir relever de ce qui peut être prévu par une loi de financement de la sécurité sociale. D’autre part, l’Assemblée nationale est désormais dans une configuration où le recours au 49.3 est davantage justifié : destiné à créer une majorité sur un texte lorsqu’elle n’existe pas ou qu’elle est incertaine, dès lors que le Gouvernement ne dispose que d’une majorité relative, son utilisation est supposée correspondre à ce pour quoi il fut prévu. Au contraire, l’utiliser en mars 2020, seulement pour contrer l’obstruction, était totalement illégitime.

Cependant, quoiqu’il s’agisse de l’une des priorités du Président de la République, qu’il a dû abandonner au cours de son premier quinquennat, le procédé peut surprendre, au moins à double titre.

D’abord, s’agissant d’une réforme majeure, la réaliser par voie d’amendement, au détour d’un texte dont l’objet principal n’est pas la réforme en question, réduit le débat politique et s’apparente, de surcroît, à un passage en force. On perçoit bien la tactique consistant à admettre que, quels que soient le moment et la façon de faire, la réforme sera de toute façon contestée, donc autant procéder ainsi, avec un triple objectif : gagner du temps, recourir au 49.3 et, par la même occasion, prendre la droite des Républicains au piège, car elle a indiqué vouloir voter contre les textes budgétaires, alors qu’elle a toujours été favorable au recul de l’âge légal de départ à la retraite.

Ensuite, cette façon de procéder éclaire sur la méthode de gouvernance.

À l’issue d’un quinquennat où l’Exécutif a été particulièrement directif, avec une majorité et, par extension, une Assemblée nationale qui le suivaient aveuglément, le nouveau quinquennat impose une nouvelle méthode, pour deux raisons. La raison directe est que le Gouvernement ne dispose plus de majorité absolue et qu’il doit donc composer avec des alliés. La raison indirecte, cause d’ailleurs de la première, est que si Emmanuel Macron a été démocratiquement élu, il a été politiquement battu et les élections législatives l’ont partiellement désavoué. Il lui faut en tenir compte.

C’est ce qui l’a conduit, semble-t-il, à introduire davantage de concertation, du moins en apparence jusqu’à présent : tel est le rôle du Conseil national de la refondation (qui pourrait d’ailleurs ne pas survivre à une réforme des retraites par amendement) ou des « entretiens de Bercy » pour préparer le budget.

Malgré tout, une réforme des retraites imposée par amendement gouvernemental reviendrait à restaurer cette verticalité, dont le Président de la République a du mal à se défaire mais à laquelle il lui faut pourtant renoncer, au risque, sinon, d’être désavoué par ses propres alliés. Peut-être pas immédiatement, mais il doit tenir cinq ans, sans oublier qu’une dissolution, toujours possible, serait à hauts risques… d’autant plus lorsque l’on voit ce qu’il se passe en Italie.

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