Ce billet est initialement paru sous forme de tribune sur lejdd.fr, cosignée avec Philippe Blachèr
On a déjà eu l’occasion de dénoncer l’illégalité de la primaire populaire, qui n’est pas une primaire, quoiqu’elle en porte le nom mais qui s’apparente davantage à un sondage, quoiqu’elle n’en retienne pas la dénomination.
À l’heure où les inscriptions pour y participer sont closes et que sont revendiqués pas moins de 467 000 inscrits – soit bien davantage qu’à la primaire d’EELV, en septembre mais beaucoup moins que le nombre de votants aux primaires organisées par le Parti socialiste (en 2011 et en 2017) ou Les Républicains (en 2016) –, il faut s’arrêter sur un autre aspect tout aussi problématique de ce processus : son financement. Car la primaire populaire s’inscrit directement dans le cadre de l’élection présidentielle, qui connaît des règles strictes relatives tant au financement des partis politiques qu’au financement de la campagne électorale de chaque candidat.
D’ici quelques semaines, s’ouvrira la période de recueil des parrainages pour les candidats à l’élection présidentielle. Il s’agit des soutiens que ces candidats doivent obtenir de la part d’au moins 500 personnes habilitées : les maires, les élus des collectivités régionales et départementales (ou équivalent) et les parlementaires. Ces parrainages doivent émaner d’au moins trente départements différents et un candidat ne peut en comptabiliser plus de 10% dans un même département. Ils sont adressés au Conseil constitutionnel, qui les publie au moins deux fois par semaine : ils sont donc publics, ce que le même Conseil avait eu à examiner pour conclure à la parfaite conformité de cette publicité à la Constitution.
Car, bien qu’elle en porte le nom, cette initiative n’est pas une primaire. Et bien qu’elle n’en porte pas le nom, elle n’est autre qu’un sondage.
Elle n’est pas une primaire non pas en ce qu’elle est organisée par une structure différente d’un parti politique, mais bien parce qu’elle entend soumettre à l’appréciation de ceux qui exprimeront un choix, des personnalités qui ont expressément refusé de s’y inscrire. Le processus des « primaires », en France, n’est régi par aucune loi ni par aucun règlement et il est dès lors délicat de le définir précisément. Cependant, l’inexistence d’une réglementation spécifique en matière de primaires n’exclut pas de respecter la réglementation générale en matière d’élection.
Dans trois mois exactement, nous voterons pour le premier tour de l’élection présidentielle. Prédire l’avenir est impossible, mais nul doute que nous irons, d’ici là, de surprises en rebondissements, qui feront la richesse de la campagne électorale.
2022 est ainsi une année électorale où il s’agira de désigner celle ou celui qui sera chargé de définir la politique nationale des cinq prochaines années, sur la base du programme soumis aux Français et débattu pendant la campagne et, surtout, soutenu par une majorité à l’Assemblée nationale.
Les exégètes de notre Constitution pourraient s’offusquer d’une éventuelle erreur dans ce propos, puisqu’aucun article ne confie une telle mission au Président de la République, alors que l’article 20 confie au Gouvernement la tâche de « déterminer et conduire la politique de la nation ».