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Une pétition aux conséquences historiques et inédites ?
Qu’est-ce que la loi Duplomb ?
La loi Duplomb a été votée par le Parlement le 8 juillet dernier, elle a pour but de répondre aux demandes exprimées par des filières agricoles et réautorise ainsi temporairement un insecticide néonicotinoïde, l’acétamipride. Ce néonicotinoïde, autorisé par l'Union européenne jusqu'en 2033 et dans les autres pays membres, avait été totalement interdit en France en 2018.
Le 10 juillet 2025, une pétition demandant l'abrogation de la loi dite « Duplomb » a été déposée par une étudiante sur la plateforme des pétitions de l'Assemblée nationale. Elle a recueilli plus de 1,8 million de signatures au 23 juillet 2025. Elle devrait faire l'objet d'un débat lors de la rentrée parlementaire cet automne mais ne pourra pas revenir sur le texte définitivement voté par le Parlement le 8 juillet 2025 et conduire à son abrogation.
Quelle finalité pourrait donc avoir la pétition ?
La pétition contre la loi Duplomb a dépassé le million de signatures en quelques jours, un succès retentissant, mais aussi historique et inédit. C’est la première fois qu’une telle pétition dépasse le seuil des 500 000 signatures, conduisant à la possible organisation d’un débat en séance publique à l’Assemblée nationale, auquel la présidente s’est dite favorable puisqu’une telle mobilisation ne peut laisser indifférent.
Alors que la loi a été adoptée par le Parlement le 8 juillet dernier, celle-ci est actuellement examinée par le Conseil constitutionnel, qui dispose d’un mois pour rendre sa décision. Toutefois, la pétition n’aura aucune incidence sur la décision que rendra le Conseil des Sages puisque celle-ci ne porte pas sur la constitutionnalité de la loi.
De plus, la pétition ne pourra avoir pour effet d’abroger la loi puisqu’une loi adoptée ne peut être abrogée que par une autre loi ; en d’autres termes, il faudra qu’un parlementaire, ou que le premier ministre, décide du dépôt d’une proposition ou d’un projet de loi visant à l’abrogation de la loi Duplomb.
Toutefois, une possibilité existe pour que cette loi ne soit pas promulguée. En effet, à supposer que le Conseil constitutionnel valide la conformité de la loi à la Constitution, cette même loi sera dès lors soumise au président de la République pour promulgation. Il disposera d’un délai de 15 jours pour la promulguer toutefois l’article 10, alinéa 2 de la Constitution offre au Président de la République la possibilité de demander une nouvelle délibération au Parlement et qui, si contresignée par le Premier ministre, ne peut la refuser. Cette demande de nouvelle délibération ne peut toutefois porter que sur une partie seulement de la loi.
Cet article 10 alinéa 2 de la Constitution s’apparente à une véritable forme de droit de veto suspensif puisqu’elle permet au chef de l’Etat de ne pas promulguer une loi et de la renvoyer au Parlement, pour que ce dernier l’examine à nouveau, en reprenant l’intégralité de la procédure législative. Cette procédure n’a été utilisée qu’à trois reprises depuis le début de la Ve République (1983, 1985 et 2003).
Le Président de la République, connu pour être soucieux des sujets relatifs à l’environnement et devant la mobilisation populaire contre la loi Duplomb, pourrait alors conférer un impact réel à la pétition en ne promulguant pas la loi.
En ne promulguant pas la loi et en prenant acte de la pétition, le Président de la République pourrait permettre à l’Assemblée nationale non pas de débattre à nouveau mais de débattre effectivement sur cette loi. En effet, la loi Duplomb n’a jamais été débattue puisque lors de son examen en première lecture, une motion de rejet avait été soutenue par le rapporteur même du texte et adoptée, soit un levier procédural qui avait permis de couper immédiatement court au débat et qui avait permis de contourner la discussion des près de 3 500 amendements déposés.
Pour lire ou écouter sur le sujet :
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Tribune publiée dans Le Monde.
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Interview dans le Titre à la Une.
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Article dans Ouest France.
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Article dans l’Info au Quotidien.
Crédit photo : PHOTO Gilles Bader