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Un avant goût du procès Le Pen via la décision du Conseil constitutionnel ?
Alors que le Conseil constitutionnel s’apprête à rendre sa décision sur l'inéligibilité d'un élu de Mayotte, Rachadi Saindou, ce vendredi 28 mars, certains y voient un premier lien avec le jugement que rendra le tribunal correctionnel concernant Marine Le Pen dans l'affaire des assistants d'eurodéputés du FN.
Rappelons les faits : Rachadi Saindou, élu de Mayotte, a été privé de son mandat local après avoir été condamné à une peine d'inéligibilité avec exécution provisoire, c'est-à-dire s'appliquant immédiatement, même en cas d'appel. Ce dernier a estimé que cette règle était contraire à la Constitution, car elle porterait atteinte à la séparation des pouvoirs et à la « préservation de la liberté de l’électeur ». Saisi, le Conseil d'Etat a jugé que la question valait d'être transmise au Conseil constitutionnel qui va donc devoir se prononcer sur les articles L. 230 et L. 236 du code électoral qui prévoit que "tout conseiller municipal qui, pour une cause survenue postérieurement à son élection, se trouve dans un des cas d'inéligibilité prévus par les articles L. 230, L. 231 et L. 232 est immédiatement déclaré démissionnaire par le préfet".
Mais cette décision tant attendue par le Conseil constitutionnel arrive 3 jours avec que le Tribunal correctionnel n’est à se prononcer sur le cas de Marine Le Pen puisque le parquet a réclamé en novembre une peine de cinq ans d'inéligibilité avec exécution provisoire contre Marine Le Pen, dans l'affaire des assistants d'eurodéputés du Front national, ainsi beaucoup y voit un lien.
Si la demande de peine d'inéligibilité était attendue car obligatoire en cas de condamnation pour détournement de fonds publics, celle d'exécution immédiate l'était beaucoup moins. Une telle condamnation empêcherait la triple candidate à l'élection présidentielle de se présenter une quatrième fois à l'Elysée en 2027.
C’est donc la question de la peine d'inéligibilité avec exécution provisoire qui est au cœur des débats mais y a-t-il un réel lien entre ces deux affaires ?
Pour le constitutionnaliste Jean-Philippe Derosier, il n’y a pas de lien. « Sur le plan strictement du droit, il n'y a pas de conséquence à envisager à l'égard de Marine Le Pen », »Cela concerne un élu local, ce que n'est pas Marine Le Pen. Elle est députée et justement les parlementaires ne sont pas déchus de leur mandat. »
Le Conseil constitutionnel, chargés des élus nationaux, s’est toujours refusé de déchoir de leur mandat les parlementaires condamnés à une peine d'inéligibilité immédiate puisqu'elle n'est pas définitive.
Dès lors, la décision que rendra le Conseil constitutionnel s’appliquera-t-elle seulement à la QPC ou pourrait-elle avoir une portée plus large ? « Le Conseil constitutionnel est rarement aventureux. Il se limite à répondre aux questions posées. Or, la seule question posée est de savoir si l'exécution provisoire emporte déchéance du mandat ou non. Ce n'est pas la constitutionnalité de la peine d'inéligibilité, ni celle de son exécution provisoire », souligne le Professeur Jean-Philippe Derosier.
A trois jours du jugement que rendra le tribunal correctionnel, le Rassemblement national scrutera le résultat de la QPC, espérant qu'à travers leur décision concernant l'élu de Mayotte, les Sages acteront plus largement que la liberté de l'électeur doit primer sur l'exécution immédiate. Pour Jean-Philippe Derosier, « Il y aura inévitablement une lecture qui sera faite en lien avec l'affaire Le Pen, alors même que sur le fond du droit il n'y a pas de lien », qui complète qu’il aurait été « bien plus censé et judicieux de la part du Conseil constitutionnel de différer de quelques jours le rendu de sa décision ».
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Le Conseil constitutionnel va devoir ce vendredi 28 mars s'exprimer sur une affaire concernant un élu de Mayotte déchu de son mandat. Le Rassemblement national scrutera la décision des Sages, espérant y trouver les arguments contre la peine d'inéligibilité avec exécution provisoire qui menace Marine Le Pen.
Y a-t-il un lien entre Rachadi Saindou , ancien conseiller municipal de Mayotte, et Marine Le Pen ? A priori, non pourtant le RN et notamment Marine Le Pen scrutera attentivement la décision rendue par le Conseil constitutionnel.
Les sages devront répondre à la question suivante : est-il constitutionnel qu'une peine d'inéligibilité avec exécution provisoire entraîne la déchéance immédiate du mandat de l'élu local, mais pas celle du parlementaire ? Cette QPC soulève d’autres interrogations telles que la présomption d'innocence, la séparation des pouvoirs ou encore la liberté de l’électeur.
Cette QPC semble être, pour le RN, un avant goût du verdict du procès de Marine Le Pen qui sera rendu ce lundi 31 mars, elle risque une menace d'inéligibilité ainsi, si elle était condamnée lundi, la cheffe du parti serait écartée de la présidentielle en 2027.
Pour le constitutionnaliste Jean-Philippe Derosier, ce semblant de lien est faux puisque la décision du Conseil constitutionnel n'a d'effet que pour les élus locaux, et non pour elle. « il n'y a aucune lecture qui permettrait d'identifier une conséquence de la QPC sur le procès de Marine Le Pen ». « La décision du Conseil constitutionnel n'a d'effet que pour les élus locaux, et non pour elle. Et parce que la décision implique une déchéance immédiate du mandat, ça ne la concerne pas davantage » puisque les députés ne perdent pas le leur.
Si le Conseil constitutionnel remettait en cause l'exécution provisoire, Marine Le Pen, alors députée du Pas-de-Calais, y trouverait pour seul avantage de garder son siège de conseillère départementale.
Quant à Louis Aliot, vice-président du RN et coprévenu, ce dernier pourrait conserver son mandat de maire de Perpignan.
Alors que le garde des Sceaux avait jugé en novembre qu'« il serait profondément choquant que Marine Le Pen soit jugée inéligible et ainsi ne puisse pas se présenter devant le suffrage des Français ». En janvier, le Premier ministre, lui-même relaxé dans une affaire similaire d'emplois fictifs, trouvait cela « très dérangeant ». Pour le Professeur Jean-Philippe Derosier, « ça signifierait qu'il ne faut jamais prononcer d'exécution provisoire. Et que la peine d'inéligibilité est antidémocratique. On ne peut pas s'y rallier », « On oublie le fond : un manquement manifeste à la probité ». « Marine Le Pen veut tirer de la QPC une conclusion simpliste qui serve sa stratégie de défense ».
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